Le Diable peut avoir de nombreux visages. Et s'il avait le vôtre ?
Le corps martyrisé d'un garçon de onze ans est retrouvé dans le parc de
Flint City. Témoins et empreintes digitales désignent aussitôt le
coupable : Terry Maitland, l'un des habitants les plus respectés de la
ville, entraîneur de l'équipe locale de baseball, professeur d'anglais,
marié et père de deux fillettes. Et les résultats des analyses d'ADN ne
laissent aucun doute. Dossier classé. À un détail près : Terry Maitland a
un alibi en béton. Et des preuves tout aussi irréfutables que les
preuves qui l'accusent.
Qui se cache derrière ce citoyen au-dessus de tout soupçon ?
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Série :
Éditeur : Albin Michel
Date parution : 02/01/2019
Format : Ebook
Première page
1
C’était une voiture banalisée, une berline américaine quelconque, plus très jeune, mais les pneus à flanc noir et les trois hommes à l’intérieur en trahissaient la nature. Les deux assis à l’avant portaient des uniformes bleus. Celui à l’arrière, en costume, était un colosse. Deux jeunes Noirs se tenaient sur le trottoir ; l’un, le pied posé sur un skate orange éraflé, l’autre avec le sien, couleur citron vert, sous le bras. Ils regardèrent la voiture pénétrer sur le parking du parc de loisirs Estelle-Barga, puis échangèrent un regard.
Le premier dit : « C’est les flics.
– Sans blague », répondit l’autre.
Ils s’en allèrent sans rien ajouter, sur leurs skates. La règle était simple : lorsque les flics débarquent, il faut filer. La vie d’un Noir compte autant que celle d’un Blanc, leur avaient appris leurs parents, mais pas forcément aux yeux de la police. Dans l’enceinte du stade de baseball, le public se mit à pousser des acclamations et à taper dans ses mains en rythme quand les Golden Dragons de Flint City revinrent à la batte au début de la neuvième manche en comptant un point de retard.
Les deux garçons ne se retournèrent pas.
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Déposition de M. Jonathan Ritz (10 juillet. 21 h 30. Interrogé par l’inspecteur Ralph Anderson)
Inspecteur Anderson : Je sais que vous êtes bouleversé, monsieur Ritz. C’est compréhensible. Mais j’ai besoin de savoir très précisément ce que vous avez vu en début de soirée.
Ritz : Je ne pourrai jamais l’oublier. Jamais. Je ne serais pas contre avaler un cachet. Du Valium, peut-être. Je n’ai jamais pris ces machins-là, mais là, il le faut. J’ai encore l’impression d’avoir le cœur au bord des lèvres. Dites à vos gars de la police scientifique que s’ils trouvent du vomi, et je parie qu’ils en trouveront, c’est le mien. Et j’en ai pas honte. N’importe qui aurait rendu son dîner en voyant un truc pareil.
Inspecteur Anderson : Je suis sûr qu’un médecin vous prescrira un calmant dès qu’on aura terminé. Je m’en charge, mais en attendant, je préfère que vous gardiez les idées claires. Vous comprenez, hein ?
Ritz : Oui, oui. Bien sûr.
Inspecteur Anderson : Racontez-moi simplement tout ce que vous avez vu et on en restera là pour ce soir. Vous pouvez faire ça pour moi, monsieur ?
Ritz : OK. Je suis sorti promener Dave sur le coup de six heures. Dave, c’est notre beagle. Il avait mangé à cinq heures. Ma femme et moi, on dîne à cinq heures et demie. À six heures, Dave est prêt à aller faire ses besoins, la petite et la grosse commission. Je le promène pendant que Sandy, ma femme, fait la vaisselle. Un partage équitable des tâches. C’est capital dans un couple, surtout une fois que les enfants sont devenus grands. C’est comme ça qu’on voit les choses. Mais je m’égare là, non ?
Inspecteur Anderson : Pas de problème, monsieur Ritz. Racontez à votre manière.
Ritz : Je vous en prie, appelez-moi Jon. Je ne supporte pas qu’on me donne du M. Ritz, j’ai l’impression d’être un gâteau apéritif. Les autres m’appelaient comme ça à l’école. Cracker Ritz.
Inspecteur Anderson : Je vois. Donc, vous promeniez votre chien…
Ritz : Exact. Et quand il a senti une forte odeur – l’odeur de la mort, je suppose –, il a fallu que je tire sur sa laisse, à deux mains, et pourtant c’est pas un gros chien. Il voulait absolument aller voir ce que c’était. Le…
Inspecteur Anderson : Revenons un peu en arrière, si vous voulez bien. Vous êtes sorti de votre domicile, au 249 Mulberry Avenue, à dix-huit heures…
Ritz : Peut-être un peu avant. Dave et moi, on est descendus jusque chez Gerald, c’est l’épicerie fine au coin de la rue, puis on a remonté Barnum Street, et ensuite, on est passés par Figgis Park. Celui que les gamins appellent Frig Us Park1. Ils croient que les adultes ignorent ce qu’ils se racontent, qu’on ne fait pas attention, mais on écoute. Certains d’entre nous, du moins.
Inspecteur Anderson : C’était votre promenade habituelle ?
Lu : Non
Chronique : Non
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